90 % de matériaux récupérés pour une auberge atypique, qui dit mieux ?
Une cidrerie devient auberge
Tout se passe à Malestroit, cette ville millénaire du Morbihan, surnommée la perle de l’Oust. L’auberge se trouve à la sortie de la ville, le long du canal de Nantes à Brest. Chaque jour plusieurs centaines de randonneurs (à pied, à vélo, en kayak, en bateau…) y passent. Une autoroute ? Pas du tout ! Le lieu rêvé pour ouvrir une auberge espagnole ? Très exactement !
Maintenant que vous voyez où se passe notre histoire, place aux protagonistes. Ils sont trois, ils sont normands, voyageurs et un brin visionnaires. Pour eux, le constat est simple : avec seulement 171 auberges de jeunesse réparties sur toute la France, l’hébergement collectif de tourisme a une très belle marge de progression devant elle. L’occasion en or d’enrichir une offre beaucoup trop faible à leurs yeux.
Après quelques mois de visites et de recherches, ils arrêtent leur choix sur l’ancienne cidrerie de Léon Zitrone à Malestroit. Et là, c’est le choc pour les nostalgiques d’Interville. Oui, Léon Zitrone, si vous le voulez bien, avait une cidrerie, tout à fait bien conçue à mon avis.
Livrées par la route, les pommes n’avaient qu’à dévaler la pente naturelle du terrain. Trois étages plus bas, elles ressortaient métamorphosées en cidre. Des péniches venaient alors les chercher pour les emmener vers leurs points de ventes. Une mécanique bien huilée !
Un coup de génie pour un chantier de récup
Devenus propriétaires, nos trois normands ont du pain sur la planche. Leur idée est fixe : offrir une seconde vie à ce bâtiment en offrant une seconde vie à des matériaux. Leurs besoins sont à la taille de la bâtisse : imposants.
Une idée germe dans leur tête, pour moi c’est un coup de génie. Hop, ils la publient sur le bon coin : « Gratuit : offrons aide au déménagement, mise à disposition de nos bras et de notre camion ». Leur seule rétribution ? Ils demandent le droit de récupérer tout ce que les gens souhaitaient donner ou jeter.
Rapidement, leurs téléphones sonnent, les déménagement s’enchaînent et leur matériauthèque s’enrichit : mobilier, électroménager, peinture, vaisselle, leur cidrerie devient une véritable caverne d’Alibaba.
1200 palettes désossées
Ils n’en restent pas là. Malestroit héberge une usine Entremont, grande consommatrice de palettes. Ah, la récupération et la valorisation de palettes… Je vous en parlais déjà dans cet article consacré aux producteurs recycleurs de mobilier : que de possibles avec elles !
Qu’on se le dise, nos normands n’y vont pas avec le dos de la cuillère ! Ils récupèrent, désossent et utilisent le bois de 1200 palettes, qu’ils complètent avec du bois récupéré en déchetterie. C’est qu’ils font parler d’eux nos cocos ! Et qu’un si beau projet donne envie aux locaux de leur faciliter la vie…
Seul bois « neuf » de leur auberge : la charpente en douglas. Coupé à quelques kilomètres de là, mis à sécher depuis trois ans, le recours à du bois local a un double intérêt. Non seulement il est plus écologique, mais en plus il a poussé dans le même environnement que celui où il sert de charpente. Le taux d’humidité de l’air est le même et lui promet un bien meilleur vieillissement que s’il devait s’adapter à une nouvelle hygrométrie.
Dormir dedans, vivre dehors
Séduits par le mode de vie de l’auberge espagnole, les futurs aubergistes s’inspirent de leurs voyages passés pour imaginer leur palace du partage : deux étages de dortoir pour une cinquantaine de couchage, un étage d’espace commun pour lézarder au coin du feu, consulter le net ou encore faire une partie de jeux de société. Pour la cuisine et la toilette, tout se passe dehors, dans un écrin de nature aménagé comme une petite oasis.
Préparer sa popote est un plaisir dans cet espace de bric et de broc. Tout y est hyper bien pensé : le niveau du plan de travail est délibérément décalé (l’eau s’écoule vers les éviers), les assiettes et couverts sont bien en vue au dessus, prêts à servir et égoutter, chacun y fait sa part et profite de celle de l’autre.
La cuisine est surplombée par une terrasse, les douches (individuelles et communes) bordent une petite cour et des escaliers de verdure. Les légumes et les fruits sont partout, deux poules pondent, la végétation abonde, les oiseaux sont rois. Melting pot de déco et d’inspirations, entre le ponton de bateau pirate et la cours de récré, on s’y sent ailleurs et parfaitement à sa place. Le seul danger de s’y arrêter : vouloir y rester !
Lits chez l’habitant
Après quatorze mois de travaux, l’ancienne cidrerie accueille ses premiers touristes. Le succès est immédiat, chassés croisés, arrivés et départs, chaque visiteur enrichit le lieu. Pas tout à fait auberge – la mise aux normes pour les personne à mobilité réduite est difficile à mettre en place – l’hébergement collectif offre des lits chez des habitants pas comme les autres.
Heureux du succès de leur tiers lieu ? Les trois normands le sont, assurément ! Satisfait de leur nouveau rythme de vie ? Au bout de trois mois, les normands de Malestroit doivent se rendre à l’évidence : conduire et mettre en œuvre ce projet les a beaucoup plus enthousiasmés que de la faire vivre. Des idées fourmillent déjà dans leurs têtes.
Qu’à cela ne tienne : l’auberge est mise en vente. D’autres seront plus qu’heureux de s’y installer.
Des bateaux dans la Camargue
Pas nostalgiques pour un sou, ils profitent de cet entre deux pour élaborer leur nouvel objectif. Ce sera en Camargue espagnole, réserve naturelle pour les oiseaux, des centaines d’arbres y seront plantés et des bateaux trop vieux pour naviguer y entameront une seconde vie inespérée. Leur futur projet promet déjà de faire rêver les touristes tout en protégeant et préservant matériaux et richesses naturelles.
Vous avez hâte de voir ça ? Je vous le garantie : moi aussi !
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